Les Écrans

par Dr Martin Lanoue
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Les Écrans au coeur de ma santé

EN RÉSUMÉ

  • Si l’utilisation des écrans vous semble problématique dans votre famille, évitez de vous sentir coupable. Il s’agit d’un problème grandissant qui implique toute la société; vous n’êtes pas seuls. Prenez le temps de vous questionner sur les raisons qui ont mené à cette utilisation abusive des écrans et prenez-en conscience pour pouvoir agir et améliorer les choses.
  • Les parents doivent réviser leur propre consommation des écrans pour pouvoir servir de modèle aux enfants. Des règles familiales claires sont nécessaires (pausetonecran.com).
  • Il est conseillé d’éviter tout écran aux repas, lors des activités familiales et dans la chambre à coucher.
  • Éviter tout contenu violent chez les enfants peut réduire les troubles de comportement. Supervisez ce qu’ils regardent à travers les films, la chaîne Youtube et les jeux vidéo. Certains outils de contrôle parental sont disponibles pour les jeunes enfants; une entente familiale demeure la base.
  • Les études ont montré que l’utilisation des écrans chez les enfants pouvait mener à des troubles d’apprentissage, du langage, induire des symptômes du TDAH, mener à de l’anxiété ou la dépression, augmenter le risque d’obésité et provoquer des troubles du sommeil, entre autres.

Les écrans (Tablettes, téléphones, jeux vidéo, télévision, etc.) ont un impact important sur le cerveau des enfants, mais aussi sur celui des adultes. Ils favorisent l’activité de la zone du plaisir immédiat (en libérant de la dopamine) au détriment des zones d’apprentissage et l’enfant aura de la difficulté à garder son attention à long-terme, aura de la difficulté à « attendre », sera plus impulsif et recherchera encore plus de ces plaisirs immédiats.

L’utilisation abusive des écrans et des jeux vidéo pourrait mener à des symptômes du TDAH sans nécessairement, dans certains cas, en être un. Si l’enfant est habitué d’être surstimulé par les écrans et les jeux vidéo toujours captivants, écouter un cours de mathématiques risque de paraître ennuyeux et de moindre intérêt. De plus, l’instantanéité des écrans et la recherche de plaisir rapide amène les gens à utiliser l’écran dès qu’un moment d’ennui se fait sentir. La capacité à maintenir l’attention pour compléter une tâche plus difficile, ou encore faire des tâches redondantes ou moins stimulantes (faire le ménage de la chambre, la vaisselle, etc.) serait aussi plus difficile.

Une étude a montré un lien entre le temps passé à jouer aux jeux vidéo et le développement de symptômes du TDAH.

En plus du risque de diminuer l’attention, il y a aussi d’autres risques sur la santé physique et psychologique qui ont été notés :

  • Obésité (moins de fruits et légumes vs consommation accrue de « fast-food »)
  • Baisse de l’activité physique
  • Trouble du sommeil (qui peut lui aussi perturber l’attention)
  • Augmentation de l’agressivité et de l’impulsivité
  • Anxiété et dépression
  • Baisse des résultats scolaires
  • Problèmes de postures (douleur au cou, maux de têtes, problèmes de la colonne)
  • Risque d’accidents (chute/trauma en marchant, accident de voiture (textos))
  • Troubles visuels
  • Etc.

Le télétravail est de plus en plus populaire, mais cela implique souvent d’être assis à regarder son écran toute la journée. Comme solution à ce problème, il est possible d’avoir recours à des stations pour ordinateur afin de travailler en position debout par moment, ce qui augmente la consommation d’énergie et la dépense calorique. Travailler assis sur un ballon Swiss permet aussi de travailler les muscles du tronc. Aussi, certains pédaliers à placer sous le bureau existent sur le marché. Bref, plusieurs outils sont disponibles, et l’ajout de pauses actives dans votre routine quotidienne ne pourra qu’être bénéfique. (Voyez notre article sur l’activité physique pour plus de détails)

De plus, pour bien positionner votre poste de travail et éviter les blessures, l’Institut de Recherche en Santé et Sécurité au Travail prodigue de bons conseils ainsi qu’un outil pour déceler les erreurs fréquentes de positionnement, et l’APSSAP offre aussi un excellent guide et une affiche permettant de comprendre les éléments clés à respecter pour une bonne ergonomie au bureau.

L’effet sur la vision n’est pas à négliger non plus puisque dans les 20 dernières années, la myopie aurait doublé chez les enfants. Bien que le principal facteur de risque de la myopie soit génétique, le risque de la développer semble plus grand chez les utilisateurs d’écrans ou d’ordinateurs chez qui l’œil doit constamment s’adapter aux différentes distances qu’on lui soumet en regardant les multiples objets à proximité. À l’inverse, passer du temps pour jouer à l’extérieur, là ou le champ de vision est large et les distances, éloignées, semble diminuer ce risque. (D’ailleurs, afin de donner les meilleures chances à votre enfant dans son parcours scolaire, il est suggéré de consulter un optométriste pour s’assurer d’une bonne santé oculaire). 

Les écrans auront un impact à court terme sur le comportement de l’enfant, mais aussi à long-terme, et à l’âge adulte. Il est donc important pour l’adulte aussi de diminuer sa consommation d’écrans. Cela pourrait engendrer des comportements de dépendance, favoriser la dépression ou même générer de l’anxiété. Le parent doit aussi servir de modèle aux enfants qui pourraient copier certaines habitudes.

Certains parents pourraient se culpabiliser d’avoir de la difficulté à gérer cette mauvaise habitude de vie, autant pour eux que pour leurs enfants. ll ne faut pas. C’est ¾ des familles qui, selon des données de 2017, ne respectaient pas les temps d’écran suggérés. C’est un « nouveau » problème de société qu’on commence à peine à étudier et à en comprendre les conséquences. Il faut seulement en prendre conscience et faire des changements graduels afin de corriger le tir pour éviter des répercussions négatives à long-terme.

 

Quelques conseils pour les enfants :

Tout d’abord, consultez le site Internet https://pausetonecran.com/ pour d’excellents conseils et savoir comment discuter de ce sujet avec vos enfants, ou téléchargez le guide ICI. Établir des règles familiales claires est essentiel. Plusieurs autres outils sont disponibles sur le site web pour vous aider. Les recommandations suivantes sont tirées de la Société Canadienne de Pédiatrie.

  • De 0 à 2 ansAUCUN écran n’est suggéré, quel qu’il soit.
  • De 2 à 5 ans, éviter le plus possible les écrans (MOINS de 1h par jour)
    • Vous pouvez donner l’exemple. Ce sera bénéfique autant pour vous que pour eux, à court terme (renforcement de la relation parent-enfant) et à long-terme.
    • Évitez d’utiliser tous les écrans en présence de vos enfants; cela inclus aussi votre téléphone cellulaire qu’on prend nous aussi pour chasser l’ennui ou par habitude.
  • À partir de 5 ans, un maximum de 2h par jour est suggéré.

Suivez ce lien pour des conseils sur quel type d’écran prioriser selon l’âge.

Avant d’aller à l’école, le matin, il pourrait être utile d’éviter les écransselon le docteur en neuroscience Joël Monzée, il ne suffirait que de 4 à 9 minutes d’écran (selon l’émission de télé regardée) pour que l’attention de l’enfant soit perturbée pour le reste de la journée et ainsi nuire à ses apprentissages.

Quand savoir que c’est trop? Le site web Soins de nos enfants l’explique très bien. En complément, vous pouvez consulter notre article sur la cyberdépendance.

Vous pouvez remplir le questionnaire DÉBA-Internet dans le but de dépister et évaluer le besoin d’aide et en parler avec un professionnel de la santé.

Autres conseils :

 Voyez Linda Pagani, professeure à l’école de psychoéducation de l’Université de Montréal et chercheuse au Centre de recherche du CHU Sainte-Justine et psychologue, qui donne quelques conseils sur l’utilisation des écrans et comment les éviter.

Parfois, si une composante anxieuse ou dépressive est présente, ou des troubles de comportements semblent difficiles à résoudre, ou encore pour cerner le problème et mettre en place des stratégies efficaces, d’autres professionnels peuvent être nécessaire. Les psychologues, les psychoéducateurs  ou même les neuropsychologues peuvent vous aider.

  • Il faut un équilibre, offrir d’autres activités à l’enfant pour s’occuper (lecture, dessin, jeux de société, jeux extérieurs, sports, etc.) et privilégier les activités familiales et la socialisation entre amis.
  • Éteignez la télévision lors des repas, de la lecture, ou toute autre activité familiale. Fixez des moments sans écrans!
  • Évitez les écrans au moins 1 heure (idéalement 2h) avant le coucher pour favoriser le sommeil.
  • Évitez l’utilisation du téléphone chez les enfants.
  • Évitez TOUT écran dans la chambre à coucher et assurez une surveillance.
    • Certains enfants se lèvent en pleine nuit pour consulter le fil Facebook sur leur téléphone, jouer à des jeux comme Fortnite, ou encore allumer leur console de jeu préférée.

En bref, plusieurs problèmes sur le plan cognitif et affectif ont été notés avec l’augmentation du temps d’écran à travers les études :

  • Baisse de la réussite scolaire en communication, motricité, raisonnement et résolution de problème (JAMA pediatrics – Janvier 2019).
  • Risque pour le bien-être physique, psychologique et social. (À l’inverse, participer aux tâches familiales et passer du temps de qualité en famille semble augmenter la socialisation des enfants avec leurs pairs).
  • Le temps écran remplace des activités saines qui favorisent le développement de l’enfant (temps en famille, jeux imaginaires, activités extérieures, sommeil, etc.).
  • Un retard de langage est plus fréquent chez les très jeunes enfants (18 mois).
  • Risque d’intimidation et de cyberintimidation.
  • Les écrans auront un effet négatif pour tous les enfants, mais l’effet sera encore plus marqué chez les jeunes avec un retard de langage, d’apprentissage, un TDAH ou un trouble du spectre de l’autisme par exemple. Par le fait même, les conseils présentés ici auront un effet encore plus positif chez eux.

Le contexte et le contenu diffusé sont importants

Les écrans peuvent être utilisés pour travailler, apprendre, garder contact avec de la famille ou des amis, ou encore comme loisir pour chasser l’ennui (jeux vidéo, textos, réseaux sociaux, etc.).

C’est surtout l’usage des écrans à des fins de loisir qu’il faut tenter de limiter le plus possible, au profit d’activités sociales ou d’activités favorisants de saines habitudes de vie (activité physique par exemple).

Mais même dans les périodes de loisir, le contexte de leur utilisation est important.

En effet, il faut éviter les pièges que ces technologies apportent. Il ne faut pas que la télévision devienne la « gardienne » de nos enfants. Il peut être réconfortant de savoir notre enfant dans le salon plutôt que n’importe où à l’extérieur, ou encore il peut être satisfaisant d’avoir un moment de répit pendant que notre jeune écoute son émission favorite. Il faut cependant garder en tête qu’une utilisation abusive des écrans dans ces contextes peut être délétère pour leur développement.

À l’inverse, regarder un film lors d’une activité familiale, remplie de plaisir et de chaleur humaine sera une expérience beaucoup plus positive par rapport à l’enfant qui regardera la télévision, seul, pour se divertir et éviter l’ennui.

D’ailleurs, l’enfant a le droit de s’ennuyer. C’est pendant ces périodes qu’il peut s’adonner à des jeux imaginaires, améliorer son côté créatif, découvrir de nouveaux jeux, faire du bricolage, ou pratiquer un sport. Si on lui en donne les moyens, il pourra davantage profiter de ces moments, bien plus que si on lui donne une tablette pour se divertir.

Jouer à un jeu vidéo permettant de faire un concours de danse avec des amis ou de la famille, ou n’importe quel jeu nous permettant d’interagir en famille ou d’être actif tout en s’amusant est aussi différent que de jouer à un jeu d’action ou de tir en demeurant assis sur le fauteuil avec notre manette de jeu.

Le contenu aussi est important. Il semblerait que peu importe le nombre d’heures devant les écrans (même sans aucune diminution), visionner du contenu éducatif et éviter tout contenu violent réduirait significativement les troubles de comportement et les comportements agressifs chez les enfants. Le parent a donc un rôle à jouer pour sélectionner les émissions télé et les jeux qui seront offerts à l’enfant, du moins sous son toit.

Les Challenge TikTok ne sont pas non plus toujours adéquats et peuvent parfois représenter un risque à la sécurité des jeunes, et devenir une source d’inquiétude pour les parents. En parler avec son ado ou son enfant est une bonne idée.

Par ailleurs, selon une étude américaine de 2017, 42% des jeunes de 10 à 17 ans disent avoir vu de la pornographie et 27% de façon intentionnelle. Ce qu’on voit sur les sites pornographiques est bien différent de la réalité et pourrait mener à des problèmes sur le plan des relations amoureuses, de l’estime de soi ou sur la façon de voir les femmes. Il est probablement préférable que les parents abordent le sujet pour éviter les malentendus. Le site pausetonecran.com donne des conseils pour en parler librement, et le site web HabiloMedias donne aussi des conseils sur l’utilisation des médias numérique et le « sextage » notamment.

 Des outils de contrôle parental comme Qustodio sont aussi disponibles sur ce site et sur HabiloMédias. On retrouve aussi des guides pour bien naviguer sur le web et bien utiliser les réseaux sociaux.

Sur le site du chroniqueur techno François Charron (ou d’autres sites), vous trouvez différents outils pour augmenter le contrôle parental  sur Netflix et certaines consoles de jeu par exemple.


Ressources pour compléter la lecture

– Voyez nos articles sur la cyberdépendance et la cyberintimidation.

– Questionnaire DÉBA-Internet dans le but de dépister et évaluer le besoin d’aide et en parler avec un professionnel de la santé.

– Site web Pause ton écran

– Le temps des écrans expliqué Dr Joel Monzée, docteur en neurosciences

– Conseils pour apaiser les enfants qui ont de la difficulté à gérer les émotions.

– Conseils sur l’insomnie.

– Soins de nos enfants (https://soinsdenosenfants.cps.ca/)

Livres suggérés

– Enfants difficiles; La faute aux écrans? De Victoria Dunckley

– Les écrans : Usages et effets de l’enfance à l’âge adulte, de Stéphane Labbé


Dernière mise à jour: 2022-03-01

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